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Y a t-il une addiction des enfants au smartphone ?

Tribune – Laure Deschamps


Fondatrice de la Souris Grise et de Tabletus, démarche d’accompagnement à la parentalité numérique.
Janvier 2018

Addiction ?

Le mot est lâché : addiction. Les enfants développeraient une forme d’addiction au smartphone. Le débat est relancé avec la démarche de deux actionnaires d’Apple qui ont adressé le 6 janvier un courrier pour demander au groupe de lutter contre « l’addiction des enfants aux smartphones » (cf. cet article du Monde).

Les adultes écrivent et débattent en permanence sur le sujet des écrans et des enfants : articles et études se succèdent, certains pour dire que les enfants s’emparent avec intelligence de la technologie (cf. cette étude menée par l’université d’Oxford), d’autres pour dire que le danger est grand, voire fatal, de proposer des outils technologiques aux enfants, tout en dédouanant les parents de leur rôle.


Le dérèglement parentique

Avant toute chose, voici une petite série de questions à destination des adultes en général :
– Combien de temps passez-vous par jour sur votre smarpthone ?
– Combien d’écrans utilisez-vous quotidiennement ?

adultes smartphones Tabletus– Acceptez-vous l’idée d’éteindre  votre smartphone (totalement, d’appuyer sur le bouton d’arrêt) pendant une nuit ? Une journée ? Une demi-journée ? Une heure ? 5 minutes ? 
– Les smartphones des enfants que vous connaissez ont-ils été conçus pour des enfants ou pour des adultes ?

Il ne s’agit pas de jeter bêtement la pierre aux parents : c’est si simple d’accuser et de diaboliser ! le but est de comprendre pourquoi nous assistons depuis deux à trois ans  à un certain dérèglement de la parentalité – et comment agir dessus.


Enfants et parents depuis dix ans

Notre société a vécu une révolution d’usages inédite ces dix dernières années avec l’accroissement considérable des écrans dans les foyers et la présence chaque seconde à notre côté d’assistants de vie (nos smartphones principalement). Cette révolution s’accompagne d’un équipement de plus en plus précoce des enfants en smartphones, dès le primaire et parfois dès l’entrée au CP. Cet équipement se fait toujours pour de bonnes raisons bien sûr : les parents font ce qu’ils pensent être utile et important pour leur enfant.

Bébé parent TabletusLes enfants de leur côté n’ont pas changé. Ils jouent à 100%. Ils vivent à 100%. Ils rient à 100%. Ils se construisent, évoluent, grandissent, apprennent avec les outils qu’on leur propose, dans la société dans laquelle ils naissent et grâce au modèle permanent qu’ils ont devant eux : leurs parents. Ils apprennent progressivement à maîtriser leurs émotions et ils ont besoin d’aide pour grandir sereinement, chacun·e à leur rythme.

Les adultes par contre ont changé, radicalement ! Ils ont changé d’usages technologiques.
Fascinés par les écrans, absorbés par des tâches, nous gérons nos journées comme un puzzle temporel – et si nous avons un petit temps d’attente, notre smartphone est toujours là pour nous occuper.
Et les expériences culturelles, ludiques, sociales permises par nos smartphones s’avèrent particulièrement enrichissantes : elles donnent accès à une connaissance étendue formidable.
Nous sommes volontaires face à ces expériences technologiques toujours plus intuitives, immersives, réellement passionnantes, impressionnantes, tellement ludiques et profondément addictives. Tiens donc, le mot est lancé ! Bien sûr, on peut dire sans risque d’erreur que les adultes sont accros à leurs smartphones. Même si l’utilisation du mot addiction, issu du vocabulaire, est déviée et excessive.


L’attention et l’intelligence enfantine

smartphone Cette attirance est-elle renforcée voire provoquée par des sociétés comme Apple, Google, Facebook ? Assurément. Les pratiques marketing appliquées aux réseaux sociaux ou aux plateformes fonctionnent à merveille : tout est fait pour que vous restiez le plus longtemps possible au sein de l’appli ou du site que vous consultez, que vous regardiez des vidéos en boucle, que vous consultiez et commentiez les liens de vos amis, que vous postiez encore, que vous jouiez encore.
Les géants numériques ont basé leur modèle publicitaire sur leur capacité à capter votre attention : plusieurs ex dirigeants de ces entreprises l’ont récemment reconnu et expliqué (cf. cet article de 20 Minutes sur l’économie de l’attention). La plupart des adultes auraient besoin d’aide pour prendre de la distance par rapport à leurs usages, pour ne pas céder aux sirènes des notifications, pour acquérir des réflexes sains.

Et dans tout ça, on a oublié l’essentiel… Les enfants, vifs et intelligents, apprennent et profitent de tous les espaces de jeu qu’on leur met entre les mains. Les parents, pris par l’accélération des usages, perdent leurs réflexes de parents. A propos des usages numériques de leurs enfants, ils répètent comme une antienne : « Ils passent leur temps dessus ! Ils savent mieux que moi ! Ils se servent des écrans avant de savoir parler ! » 


L’école de la parentalité

Que faut-il faire pour aider les parents et les familles ? 

Tabletus zenTous les parents le savent : la parentalité, ce n’est pas un travail mâché par d’autres. C’est la meilleure école de la vie, celle où on expérimente, on se trompe, on réajuste. Chaque jour. Chaque année. Pour chacun de ses enfants.

Pour aider les parents, il faut d’abord les aider à prendre de la distance. Puis leur redonner confiance, leur faire prendre conscience qu’ils peuvent endosser leur rôle parental par rapport aux écrans. Ce rôle est indispensable afin que les les enfants deviennent des citoyens numériques éclairés et libres.

Et bien sûr, les parents ont besoin d’accompagnement, de formations, d’aides pour prendre des décisions raisonnables et raisonnés. Par rapport au smartphone le conseil est simple : il faut éviter de mettre dans les mains de jeunes enfants des smartphones (on ne parle pas ici de petits portables juste pour appeler et envoyer quelques SMS) et encore moins des smartphones équipés de forfait data. Les adultes ont déjà bien du mal à gérer leurs smartphones. Pourquoi donc proposer cette expérience à des enfants qui n’auront pas les armes personnelles pour s’en détacher ?

Il y a une différence majeure entre prêter un smartphone d’adulte à un enfant pour lui permettre d’accéder à un contenu de son âge (avec des temps raisonnables) et offrir un smartphone personnel à un enfant de moins de 12 ans.
Vous voulez que votre enfant maîtrise la technologie ? Attendez le plus longtemps possible pour lui offrir son premier smartphone (et tout autre outil technologique personnel). Cela ne veut pas dire l’enfermer dans une bulle non technologique. Donnez-lui accès à tout, progressivement, avec votre aide, vos explications,  vos conseils. Échangez avec lui, avec elle; soyez à son écoute toujours, partagez des jeux, des vidéos, des chaînes Youtube, des livres numériques : accompagnez-le·la !

Utiliser le numérique pour favoriser des valeurs familiales, jouer ensemble, favoriser des apprentissages, découvrir le monde : cela demande du temps, de l’adaptation, des erreurs et des réajustements. 
Mais contrairement au dérèglement climatique, les réponses au dérèglement parentique existent. Et il n’est jamais trop tard pour agir.

Laure Deschamps.
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2 Responses

  1. Merci Laure pour cet excellent article! Dans le cadre de mon travail (comme orthophoniste), je remarque effectivement une grande impuissance de la part de certains parents qui souhaiteraient mieux encadrer leurs petits, mais qui peinent à suivre l’évolution effarante de la technologie…Pas toujours facile à suivre même si on s’y intéresse!
    Il y en a d’autres qui sont très fiers de voir autant d’autonomie chez leur petits et qui ne réalisent pas qu’en fait, leur progéniture ne fait que jouer compulsivement à des jeux ou papillonner erratiquement sur internet à longueur de journée. Un accompagnement serré est absolument nécessaire de ce côté de la part des parents et des intervenants. De mon côté, même si j’utilise beaucoup le iPad en thérapie, je regrette un peu l’époque des écrans d’ordinateurs parce qu’ils se prêtaient beaucoup plus à la conversation et au partage que le iPad.

    1. Bonjour,
      Lors des rencontres Tabletus (accompagnement parentalité numérique), j’essaye avant toute chose de redonner confiance aux parents justement. Même s’ils ne sont pas à l’aise avec la technologie, même s’ils se sentent dépassés, ils restent parents et peuvent toujours encadrer, limiter les usages qu’ils ressentent excessifs, discuter avec leurs enfants, s’intéresser, sans jugement à toutes leurs pratiques. Ce sont des réflexes à retrouver :).

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